C’est par cette vieille légende du charmeur de rats que M. André François-Poncet, notre ambassadeur à Berlin de septembre 1931 à octobre 1938, termine son livre de souvenirs d’une ambassade à Berlin :
« Dans la petite ville de Hameln, les rats, jadis, pullulaient. Mais, un jour, un personnage bizarre se présenta à l’entrée de la ville. Il avait le teint blême, des yeux étranges, une mèche de cheveux sur le front. Il marchait vite, et les talons de ses bottes sonnaient sur le pavé ; et, tout en marchant, il jouait de la flûte, et il tirait de cette flûte une mélodie singulière ; et voici qu’en l’entendant, les rats commencèrent à sortir des maisons, des caves et des greniers, et à courir derrière lui.
Du danger de suivre
La mélodie les émouvait jusqu’au fond de l’âme ; elle répondait à leurs aspirations confuses, à leurs nostalgies, à leurs passions, à leurs espoirs ; elle les berçait, elle les excitait, elle les enchantait, elle exerçait sur eux une force d’attraction irrésistible. En une troupe noire, de plus en plus dense, les rats trottaient aux trousses du sorcier. Celui-ci les conduisit de la sorte jusqu’au fleuve. Sans s’arrêter, il y pénétra. Les rats y pénétrèrent avec lui, fascinés par sa musique ; et le sorcier et les rats disparurent dans les eaux… »
Le chasseur de rats, c’est Hitler.
Les rats, le peuple allemand.
Tous les hommes de bon sens se sont posés la question : « Comment l’Allemagne – pourtant terre d’humanisme et d’universalisme au XVIIIe siècle - a-t-elle pu se laisser entraîner dans l’idéologie nationale-socialiste?"
Comment a-t-elle pu accepter une nouvelle religion qui exalte la force et la ruse ?
François-Poncet explique la docilité du peuple allemand par le fait qu’elle avait trouvé en l’homme celui qui pouvait réaliser ses aspirations confuses de domination, ses nostalgies, ses passions de haine, ses espoirs de bonheur au détriment des autres humains.
Cette conclusion doit nous interpeller ; des joueurs de flûte qui jouent sur les aspirations les plus méprisables, nous en connaissons. Alors, tirons les leçons de l’histoire.
Observateur de la comédie humaine
Pour tirer la sonnette d’alarme