Qu’est-ce qui vous fait avancer ? Qu’est-ce qui permet aux hommes de réaliser leurs rêves ? Qu’est-ce qui peut ruiner nos vies ? L’HISTOIRE nous fournit des réponses. Examinons, analysons les faits qui bouleversent notre société. Les lectures les plus diversifiées ouvrent notre esprit sur le Monde. Lire a tant de mérites : imaginer, apprendre, rêver…
– Allô, vous pouvez venir me voir ?
– C’est pour quoi ?
– J’peux pas vous dire.
– Mercredi, à 9 h 30, ça vous irait ?
– Non, il faut venir à 7 h 00.
– Pourquoi si tôt ?
– Parce que les patrons ne sont pas levés.
Je réfléchis : Je ne dois pas être vu. Pourquoi une telle peur de l’employeur ? Serais-je un danger, celui à qui l’on révèle une situation à cacher.
– D’accord pour 7 h 00.
– Vous passerez par l’arrière, j’ouvrirai le portillon du jardin. J’attendrai à la porte de la remise. Ne frappez pas.
Qu’est-ce qui peut bien m’attendre à ce rendez-vous pour le moins étrange ? Et si je tombe nez à nez avec le patron !
Le jour convenu, je stationne ma voiture à bonne distance. Ne pas éveiller les soupçons du patron. Le petit portillon en fer est entrouvert, il ne grince pas. Le jour n’est pas encore levé ; où est l’entrée de la remise ? J’aperçois une silhouette dans l’entrebâillement d’une porte. Je m’approche, il place son index devant sa bouche. Compris : « Ne pas parler ». Nous traversons une pièce encombrée d’objets et de meubles hors d’usage, puis un grand salon légèrement éclairé par une grande baie vitrée de la couleur d’un vitrail ; on se croirait dans une chapelle. Je heurte une petite table basse. Pas de bruit, pas de casse. Ouf ! Je n’ai réveillé personne. Il se retourne, l’index toujours en travers des lèvres « Silence ! » L’homme m’invite à presser le pas. Un escalier étroit : les marches vont-elles craquer ? Non. Arrivée sous les toits. Nous n’avons encore échangé aucun mot.
« Entrez ! » Petite pièce sous les toits. L’odeur ne trompe pas. Ici, ils cuisinent et prennent leurs repas. Je parle au pluriel car une femme est arrivée. « Apporte un café. » Effacée et apeurée, elle m’apporte la tasse fumante. À cette heure matinale, la pièce dégage une odeur de renfermé. Je manque un peu d’air. Je sors mon cahier, prêt à noter les doléances dans ce lieu étouffant. Mon client parle doucement ; ne pas réveiller les patrons.
– Je vous ai fait venir tôt ; ils dorment encore à cette heure. Ils ne doivent pas vous voir.
– Mais pourquoi m’avez-vous appelé ?
– Avec ma femme, nous devons nous occuper d’eux le jour et la nuit. Le mari est malade et la femme est méchante.
– Comment êtes-vous arrivés ici ?
– Je vous expliquerai.
– Ils nous terrorisent ; c’est atroce ; il faut travailler à toute heure. Nous nous épuisons.
Esclavage moderne. Mais que puis-je accomplir pour eux ?
– Comment êtes-vous arrivés jusqu’à moi ?
– Au cabinet médical, on m’a donné votre nom ; ils ont dit que vous pouviez nous aider.
Christian Dechartres - écrivain public - http://cd-lmdp.over-blog.fr
Durant des mois, je tenterai d’améliorer leur sort. Une famille bourgeoise avait fait venir ces esclaves modernes de l’hémisphère sud. Dénoncer de telles pratiques ? Grande question. J’ai rassemblé les cas les plus atypiques de mon activité dans un manuscrit.